Dame Maeve regarda longuement la jeune fille. Comme elle avait grandi ! C’était une femme à présent. Ses longs cheveux ébènes cascadaient sur ses épaules et les longues méches soulignaient encore plus l’éclat de ses yeux émeraudes. Sa candeur, sa fraîcheur était si touchante.
- Dame Maeve ? Vous étiez en chasse ?
Naurloth épousseta négligemment la poussière qui s’était collé sa peau.
Inconsciente de sa propre féminité, ce qui la rendrait encore plus désirable aux yeux d’un homme. La chasseresse soupira.
- Dame Maeve ?
- Tu dois retourner te coucher.
Naurloth détailla à son tour la chasseresse. Elle était si belle. Sa crinière de feu étincelait sous l’éclat de la pleine lune. Son armure de cuir tanée couvrait à peine son corps. Les tâches de rousseur adoucissait son regard dur et sévère. Les plumes vertes de ses flèches sortaient du carquois. Elle semblait inquiète.
- Qu’est-ce qui se passe, Dame Maeve ?
- Il est trop tard… ça a commencé.
Naurloth scruta la Cité Endormie, ne comprenant pas.
- Nous partons. Va chercher tes affaires et surtout quoi qu’il arrive… N’écoute pas. Détourne ton regard de tes sœurs.
- Mais….
- Obéis.
Le ton impérieux de la rousse ne laissait pas matière à protester.
La jeune femme grimpa les escaliers aussi vite qu’elle le pouvait. Des ombres mouvantes couvraient le haut des escaliers. Elle cligna des yeux et accéléra encore le rythme.
Des cris étranges envahissaient les étages supérieurs de la cité à l’instant ou Naurloth refermait les sangles de sa sacoche. Elle attrapa ses fidèles dagues et fila hors de la chambre sans un regard pour la blonde Diamant qui s’étirait lascivement.
Une ombre l’attendait à la sortie de la chambre. Elle serra ses dagues, prête à frapper. L’ombre s’approcha et entra dans la lumière. Un homme ? C’était donc ça, un homme… ça n’avait rien d’un monstre hideux… L’homme lui parla d’une voix douce. Il lui demandai de le suivre. Il avait l’air tellement gentil… Naurloth tendit sa main vers lui et toucha doucement son visage. Ses sourcils plus fournis, ses cils doux et fins, ses lèvres figées dans un sourire tendre. Son menton. Elle retira vite sa main.
- ça pique…
Il rit doucement. Ses cheveux blonds s’agitant sur ses épaules larges, elle ne pouvait plus détourner son regard du sien. Elle avait oublié l’inquiétude de Dame Maeve et son empressement initial. Il prit sa main dans la sienne plus large et plus rugueuse et l’entraîna dans l’escalier. Il la souleva comme on le fait d’une feuille. Elle avait l’impression de voler dans ses bras puissants. Elle se blottit contre son torse, étonnée de ne pas sentir de seins mais une poitrine aussi dure que ses bras et des poils doux comme comme ses cheveux.
Il la déposa doucement contre un arbre et la contempla longuement. Il approcha une main du visage de la jeune femme et toucha son visage comme elle l’avait fait. Il semblait au moins aussi étonné qu’elle. Il effleura la peau douce de sa gorge jusqu’à la naissance de ses seins. Ils rougirent tous les deux et ils se rapprochèrent encore jusqu’à ce que leurs lèvres se touchent. Ils se laissèrent emporter par la volupté de leur premier baiser.
Il s’effondra soudain. Maeve regarda Naurloth et la gifla de fureur et de peur mêlée.
- Mais…
- Où sont tes affaires ?
Naurloth regarda autour d’elle. Maeve soupira.
- Allons les chercher.
Maeve tirait Naurloth derrière elle. La jeune femme avait de la peine à suivre la chasseresse. Ses pieds touchaient à peine le sol. La Cité était envahi par des hommes. Ils courraient après ses sœurs qui riaient aux éclats.
- Naurloth, ne regarde pas. Ferme les yeux et suis-moi.
- Mais…
- Arrête de te poser des questions et contente-toi de me suivre.
Naurloth ferma les yeux, mais elle ne pouvait s’empêcher d’entendre. Gémissements, vêtements que l’on déchire, elle avait entendu assez de récits sur la brutalité des hommes pour s’imaginer ce qu’il se passait.
Elles arrivèrent à la chambre, Maeve s’empara du sac. Naurloth reprit ses lames. Elle s’accrochait à elles, la terreur grimpant dans son esprit. La panique s’emparait de son corps.
Elle sanglota.
- Qu’est-ce qui se passe ?
- Viens…
Maeve semblait décider à ne rien dévoiler. Elles sortirent de la chambre. Maeve s’arrêta brusquement.
Le bruit d’un arc qu’on bande.
- Enlève-toi de notre chemin.
Un rire cristallin mais inquiétant raisonna en face d’elles.
- Pousse-toi de mon chemin. Je n’hésiterai pas.
Encore ce rire. Un rire de femme.
- Ainsi la chasseresse protège la biche. Que fait-elle éveillée ?
Un long silence s’en suivit. Naurloth ouvrit les yeux. Elle salua celle qui était la Mère de la Cité.
- Mère… Protégez-nous. Ils… ils envahissent la Cité. Vos filles se font…
Le rire sec et glaçant lui coupa la parole.